Avec 500.000 décès par an dont un tiers par cancer, l’accès à ces soins est devenu un enjeu majeur.
«L’objectif des soins palliatifs est de prévenir et soulager la souffrance, de préserver le plus possible la qualité de vie des malades et de leur entourage (…). De ce fait, les soins palliatifs s’érigent au moins autant en soins de support qu’en soins de fin de vie, souligne le rapport Sicard rendu en décembre. Dès lors, (…) les soins de support et les soins palliatifs (doivent être prodigués) avec le même degré d’exigence que les soins curatifs.»
Cette démarche est depuis longtemps celle des unités de soins de support en cancérologie ou de médecine palliative, là où elles existent, et bénéficie d’une recherche intense pour soulager au mieux les symptômes liés à la maladie ou à la fin de vie. Avec un credo – la prise en charge globale du malade dans toutes ses dimensions médicales et psychosociales – qui commence à inspirer peu à peu toute la médecine des maladies chroniques.
Les soins de support viennent s’ajouter au traitement spécifique de la maladie. Comme le précise le Dr Florian Scotté, oncologue (HEGP, Paris), «c’est l’ensemble des traitements et des organisations de soins qui permettent d’accompagner le patient tout au long de sa maladie, depuis l’annonce du diagnostic jusqu’à l’arrêt du traitement, soit parce que le cancer était curable et que le malade va pouvoir reprendre le cours normal de sa vie, soit parce que, la maladie s’aggravant, on va aller vers un accompagnement palliatif de fin de vie».
Une médecin née du refus de laisser mourir dans de mauvaises conditions
Dans les années 1980, la démarche palliative, née du refus de laisser mourir dans de mauvaises conditions, a ainsi évolué, avec l’émergence du sida, vers l’accompagnement de la maladie. «Le cancer est de la même façon passé du statut de maladie mortelle à celui d’une maladie dont aujourd’hui plus de 50 % de patients sortent guéris, même s’il faut parfois les accompagner ensuite.»
Ces soins de support reposent sur une collaboration multiprofessionnelle entre médecins, infirmières, nutritionnistes, kinésithérapeuthes, psychologues, diététiciennes, assistantes sociales, bénévoles… Et aussi multidisciplinaire, car elle associe des oncologues, anesthésistes, chirurgiens, radiothérapeuthes, radiologues, psychiatres, etc. «L’idée-force, c’est qu’il n’y a pas de raison de limiter cette prise en charge globale aux situations palliatives avancées. Les malades complexes, pour lesquels il faut coordonner de multiples intervenants, sont souvent des patients en soins palliatifs, qui ne vont pas guérir. Mais ceux en phase curative ont aussi de gros besoins dont la prise en compte influe sur l’efficacité des soins et le retour à la vie normale», insiste le Dr Laure Copel, oncologue (Institut Curie, Paris).
La lutte contre la douleur est au premier plan
Pour autant, le distinguo entre soins palliatifs et soins de support reste valide. «En situation palliative, la priorité absolue donnée au confort du patient conduit à des pratiques plus restrictives. Une occlusion intestinale ou une anémie peuvent conduire, en situation curative, à un geste chirurgical ou à une transfusion, qu’on ne fera pas chez un patient en soins palliatifs», explique le Pr Didier de Broucker (USP, GHICL Lille). La loi Leonetti semble avoir beaucoup contribué à réduire «l’obstination déraisonnable» en fin de vie.
À tous les stades, la lutte contre la douleur est au premier plan. «Il y a eu d’immenses progrès dans la prise de conscience de la douleur et dans les moyens médicaux d’y faire face. Pour la plupart des patients en situation avancée, on arrive maintenant à trouver un traitement efficace contre la douleur, même s’il faut parfois tâtonner, estime le Dr Copel. Recours plus large aux morphiniques, nouvelles formes galéniques plus simples, à effet plus rapide, pompes à morphine…» «Avec aussi les perfusions continues d’analgésiques, les techniques interventionnelles pour anesthésier une région ou réduire la douleur des métastases osseuses, etc., nous contrôlons beaucoup mieux la douleur», précise le Dr Scotté.
L’enjeu de l’égalité d’accès
Progrès aussi dans la lutte contre les nausées, la perte d’appétit, les troubles digestifs ou respiratoires, l’anémie, la fatigue, les effets secondaires des traitements. Quant aux répercussions psychologiques, pour le Dr Sarah Dauchy, psychiatre (IGR, Villejuif), «les symptômes et le retentissement fonctionnel de la maladie ont souvent plus d’impact psychologique que son stade évolutif. Notre rôle est de favoriser cet ajustement psychologique du patient face à cette réalité écrasante, à ce désordre émotionnel, à ces nouvelles priorités et parfois à ces renoncements auxquels il se trouve confronté».
L’enjeu de ces soins est important: une étude en 2010 a montré qu’à traitement égal, dans le cancer du poumon métastasé, les malades bénéficiant de soins de support précoces souffraient moins, avaient une meilleure qualité de vie et gagnaient trois mois de survie. Les progrès, réels, restent toutefois encore trop confinés aux unités spécialisées. Faute de places suffisantes dans celles-ci et d’une diffusion accrue aux autres structures, l’égalité d’accès à ces soins reste à conquérir.
Source : Article du Figaro Santé (3 mai 2013)