Extrait du Rapport Sicard (p.89 à 98) : PROPOSITION D’UNE SOLUTION A LA FRANÇAISE

La recommandation première est avant tout, de donner la plus grande importance aux paroles et aux souhaits des personnes malades en fin de vie et de faire en sorte qu’elles soient entendues dans leur situation d’extrême vulnérabilité.

Principes généraux

  • Parce qu’il est inacceptable que la loi Leonetti ne soit toujours pas appliquée après sept ans d’existence, faire un effort majeur d’appropriation de cette loi par la société et par l’ensemble des médecins et des soignants, notamment par des campagnes régulières d’information et un effort massif de formation, pour lui donner toute son efficacité.
  • Réaliser une évaluation des financements et des besoins en personnel soignant nécessaires à un réel accès de tous à ces soins. Faire en sorte que ces financements soient attribués. Favoriser l’implication des accompagnants bénévoles.
  • Avoir conscience que le recours aux seules unités de soins palliatifs ne pourra jamais résoudre la totalité des situations, même si ces structures devaient être en nombre plus important.
  • Avoir conscience que la mort directement liée à une pratique létale ne représenterait également qu’une proportion très marginale des décès si cette pratique était légalisée, au vu des observations hors de France.
  • L’inégalité majeure en termes d’accès à un accompagnement humain approprié en fin de vie, et à l’inverse le sentiment contraint d’un passage jugé comme la seule bonne réponse, peuvent être à l’origine d’une profonde angoisse de l’opinion, qui explique en partie la demande répétée d’euthanasie.
  • Apporter toute l’attention requise à l’immense majorité des personnes en fin de vie, dont la situation ne relève pas des seules unités de soins palliatifs. Avoir une politique volontariste de développement de soins palliatifs à domicile avec des formules de « répit » pour les proches.
  • Accompagner l’annonce d’une maladie grave par un projet spécifique de fin de vie en restant avant tout attentif aux choix de la personne.

Propositions concernant des conduites prévues par les lois relatives aux droits des malades en fin de vie

Pour assurer l’effectivité des textes de loi (Loi relative à l’accès aux soins palliatifs 1999, Kouchner 2002, Leonetti 2005),  prendre des dispositions réglementaires concernant :

  • les conditions de la délivrance d’une information précise, compréhensible, claire et appropriée au malade et à ses proches, sur la proposition d’abstention, de limitation ou d’arrêt de traitements, ou d’intensification du traitement de la douleur et des symptômes, ou de sédation terminale.
  • les conditions du respect de la volonté de la personne.
  • les conditions de la traçabilité des procédures retenues.

L’ensemble des propositions de la commission énoncées-dessous doivent être une priorité dans l’allocation des moyens financiers et peuvent être financées par un redéploiement des ressources d’un curatif disproportionné par ses excès et trop peu interrogé, vers une meilleure prise en charge du « prendre soin » de la fin de vie.

1. Directives anticipées

Réaliser régulièrement une campagne d’information majeure auprès des citoyens, des médecins et des soignants sur l’importance des directives anticipées, la qualité de leur rédaction et l’effectivité de leur usage ; et sur la possibilité de désigner une personne de confiance et sur le rôle qui peut lui être confié.

Différencier nettement deux procédures :

  • Conformément à la loi, un premier document de directive anticipée pourrait être proposé par le médecin traitant à tout adulte qui le souhaite, sans aucune obligation, quel que soit son état de santé, et même s’il est en bonne santé, et régulièrement actualisé. La commission recommande que le ministère de la santé formalise dès 2013 un modèle de document s’inspirant des exemples étrangers[1].
  • En cas de maladie grave diagnostiquée, ou en cas d’intervention chirurgicale pouvant comporter un risque majeur, un autre document[1] de volontés concernant spécifiquement les traitements de fin de vie, devrait être proposé en sus du premier, notamment dans le cadre d’un dialogue avec l’équipe médicale et soignante.
    • Ce document est signé par le malade qui le souhaite (le malade a le droit en effet de vouloir rester dans l’ignorance de sa maladie ou de ne pas vouloir exprimer ses choix) et aussi par son médecin traitant.
    • Ce document, engageant, et aisément identifiable par une couleur spécifique, doit être inséré dans le dossier du malade.
    • A cette fin, la commission recommande qu’un décret soit édicté en 2013 et que le ministère de la santé là encore formalise un tel document en s’inspirant notamment du modèle des Etats-Unis.
  • Créer un fichier national informatisé de ces deux documents, notamment facilement utilisable en situation d’urgence.

 [1] Prenant en compte par exemple le programme suivis par un nombre croissant d’Etats aux Etats-Unis (Physician orders for life-sustaining treatment)

2. La formation

Demander à la conférence des doyens dès 2013 de :

  • Créer dans chaque université une filière universitaire spécifiquement destinée aux soins palliatifs.
  • Repenser en profondeur l’enseignement des études médicales afin que les attitudes curatives ne confisquent pas la totalité de l’enseignement :
    • Rendre obligatoire un enseignement de soins palliatifs qui aborde en profondeur les différentes situations cliniques.
    • Développer la formation au bon usage des opiacés et des médicaments sédatifs.
    • Susciter un enseignement universitaire et en formation continue sur ce que l’on entend par « obstination déraisonnable ».
    • Apporter tout au long de leur cursus une formation aux étudiants en médecine à l’exigence de la relation humaine dans les situations de fin de vie, grâce au concours des sciences humaines et sociales, et les amener à une réflexion sur les excès de la médicalisation.
    • Rendre obligatoire pour les étudiants, généralistes et spécialistes principalement concernés par les maladies graves, un stage en soins palliatifs durant leur internat.

Pour les instituts de formation du personnel soignant, une démarche analogue doit être conduite.

  • Pour la formation continue des médecins (Développement Professionnel Continu), exiger qu’un des programmes de formation annuelle suivi par un médecin en activité, au moins une fois tous les trois ans, porte sur les soins palliatifs et sur les attitudes à adopter face à une personne malade en fin de vie.

Pour la formation continue des soignants, une démarche analogue doit être conduite.

 3. L’exercice professionnel

L’objectif des soins palliatifs est de prévenir et soulager la souffrance, de préserver le plus possible la qualité de la vie des malades et de leur entourage, indépendamment du stade de la maladie et des besoins thérapeutiques. De ce fait, les soins palliatifs s’érigent au moins autant en soins de support qu’en soins de fin de vie :

  • Dès lors, introduire les soins palliatifs dès le premier jour de l’annonce ou de la découverte d’une maladie grave.
  • Dès lors, introduire systématiquement et dès le début de la prise en charge du malade, dans les commissions interdisciplinaires de la cancérologie en particulier, la présence d’un spécialiste de soins palliatifs.
  • Dès lors, inscrire systématiquement dans les recommandations de bonnes pratiques élaborées par la haute autorité de santé (HAS), la prise en compte des soins de support et des soins palliatifs, avec le même degré d’exigence que pour les soins curatifs.

Dans le même esprit, demander à la HAS d’élaborer, pour les maladies chroniques les plus graves, des recommandations de parcours de soin et de santé prenant en compte les souhaits des personnes malades y compris en fin de vie et l’articulation des différentes compétences sanitaires, médico-sociales et sociales (en particulier les travailleurs sociaux) coordonnées par le médecin généraliste, assisté si nécessaire par un professionnel formé à cette fonction de coordination.

5. Les hôpitaux et les établissements médico-sociaux

  • Demander à la HAS dès 2013 d’engager un travail avec les urgentistes sur leurs pratiques de réanimation afin d’éviter le plus possible de créer des situations de prolongation déraisonnable de la vie.
  • Faire de la qualité de la prise en charge des personnes en  fin de vie dans les établissements de santé et les établissements médico-sociaux, conformément aux recommandations de ce rapport, un élément déterminant dans leur certification.
  • Revoir avec les autorités compétentes le principe inadapté de la tarification à l’activité dont les conséquences sont en particulier désastreuses pour la culture palliative.
  • Demander aux agences régionales de santé (ARS) dès 2013 de s’assurer que chaque établissement de santé ou médico-social puisse avoir accès directement ou indirectement à une équipe mobile de soins palliatifs. La commission recommande qu’un rapport du ministère de la santé puisse retracer ces éléments à la fin de l’année 2013.
  • Développer l’épidémiologie de la fin de la vie par l’INSERM et l’Observatoire National de la Fin de Vie.
  • Rendre obligatoire pour chaque établissement de santé ou médico-social la transmission de ces données épidémiologiques dans son rapport annuel d’activité.

6. Le domicile

  • Demander à chaque ARS d’organiser une information sur leur site Internet permettant d’identifier et de donner une visibilité des différentes structures et compétences disponibles, auxquelles le malade et son entourage peuvent s’adresser, pour assurer la continuité des soins curatifs et de support 24h sur 24h jusqu’à la fin de vie à domicile.
  • Demander aux ARS de s’assurer de la couverture du territoire en soins palliatifs à domicile 24h/24 et 7j/7, en application des recommandations de parcours de soins et de santé de la HAS citées plus haut.
  • Permettre aux généralistes un accès libre à tous les médicaments sédatifs, sans lesquels il est illusoire d’envisager une prise en charge de la fin de vie à domicile.
  • Inscrire dans les premières priorités des ARS le renforcement de la coordination entre l’hospitalisation à domicile (HAD), les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) et soins palliatifs ; et demander aux pouvoirs publics d’engager une réflexion sur une fusion entre HAD et SSIAD, pour assurer une parfaite continuité dans toutes les phases de la prise en charge.
  • Déconcentrer vers les ARS les aides nationales dans le secteur médico-social, afin qu’elles puissent contractualiser avec les collectivités territoriales concernées des programmes d’amélioration de la prise en charge des soins de support à domicile et dans les EPHAD.

7. L’accompagnement

Demander aux pouvoirs publics de :

  • Renforcer les possibilités de congé de solidarité familiale adaptées aux situations.
  • Soutenir les associations de bénévoles d’accompagnement de fin de vie, à l’intérieur des hôpitaux et à domicile, par exemple en facilitant les exonérations fiscales de leur donateur, et l’accès au service civique.
  • Engager un travail visant à développer les « formules de répit » les mieux adaptées au maintien à domicile.

8.  L’évaluation

Permettre aux personnes en fin de vie, à leurs familles, à leurs proches ou à leurs personnes de confiance, ainsi qu’aux médecins, aux soignants et aux accompagnants bénévoles, de saisir les autorités compétentes, telles que les ARS, dans le cas d’une demande d’accompagnement de fin de vie qui ne trouve pas de réponse adaptée (sur le site Internet).

9. La néonatologie 

La culture palliative pédiatrique, qui s’est installée plus tardivement que dans les structures d’adulte, a toujours bénéficié a contrario, en particulier chez les néonatologistes, d’une réflexion beaucoup plus attentive aux questions de fin de vie que chez l’adulte. Elle doit continuer de se développer au même titre que celle concernant l’adulte avec le renforcement des programmes de formation à cette fin et la mise en œuvre de réflexions sur l’obstination déraisonnable. Obstination qui n’est pas toujours le fait de la seule médecine.

Toute décision d’arrêt de traitement, voire d’arrêt des soins de supports vitaux, doit toujours être prise avec les parents et dans le cadre d’un échange collégial pluridisciplinaire. Le travail en équipe est toujours protecteur pour l’enfant, sa famille et le personnel soignant.

 ********

La commission considère que ces propositions doivent mobiliser les pouvoirs publics et l’ensemble de la société de manière prioritaire.

Pour cette raison elle ne recommande pas de prendre de nouvelles dispositions législatives en urgence sur les situations de fin de vie.

Elle présente ici quelques réflexions sur des conduites non prévues par les lois actuelles.

 

3. Réflexions concernant des conduites non prévues par les lois relatives aux droits des malades en fin  de vie

1. L’assistance au suicide

Pour la commission, l’assistance au suicide ne peut en aucun cas être une solution proposée comme une alternative à l’absence constatée de soins palliatifs ou d’un réel accompagnement.

Mais pour certaines personnes atteintes d’une maladie évolutive et incurable au stade terminal, la perspective d’être obligé de vivre, jusqu’au terme ultime, leur fin de vie dans un environnement médicalisé, où la perte d’autonomie, la douleur et la souffrance ne peuvent être soulagés que par des soins palliatifs, peut apparaître insupportable. D’où leur souhait d’interrompre leur existence avant son terme. Leur demande est celle d’une assistance au suicide, sous la forme de médicaments prescrits par un médecin.

Ces demandes, qui sont très rares quand existe réellement une possibilité d’accompagnement sous forme de soins palliatifs, peuvent correspondre davantage à une volonté de pouvoir disposer d’un recours ultime qu’à une réelle décision d’interrompre sa vie avant terme. En effet, dans l’Etat d’Oregon, aux Etats-Unis, où le suicide assisté concerne deux décès pour mille, la moitié des personnes en fin de vie  qui demandent – et obtiennent – les médicaments leur permettant de se suicider, ne les utilisent pas.

Si le législateur prend la responsabilité de légiférer sur l’assistance au suicide, les éléments suivants devraient être pris en compte :

S’assurer que la personne demande de manière explicite et répétée sa volonté de finir sa vie par une telle assistance.

  • Reconnaître par une collégialité médicale l’existence de la situation en fin de vie de la personne malade.
  • S’assurer que la décision de la personne en fin de vie, sera prise :

*  dans la mesure où celle-ci est en capacité d’un geste autonome.

*  dans la mesure où celle-ci est informée, libre dans son choix.

*  dans la mesure où celle-ci a un réel accès à toutes les solutions alternatives d’accompagnement et de soulagement de la douleur physique et psychique.

*  dans la mesure où celle-ci est informée des conditions concrètes du suicide assisté.

*  dans le cadre d’un échange collégial pluridisciplinaire associant le malade, ses proches, le médecin traitant, un médecin non engagé dans les traitements en cours, et un soignant accompagnant le malade.

  • Requérir la présence du médecin traitant, ou en cas d’objection de conscience de ce dernier, du médecin prescripteur, lors du geste et de l’agonie.
  • Garantir l’objection de conscience des pharmaciens.
  • S’assurer que les médicaments utilisés satisfont aux exigences de la réglementation et de la sécurité sanitaires et pharmacologiques.
  • S’assurer de l’absence d’un calendrier préétabli de l’accomplissement du geste.
  • S’assurer d’une remontée d’informations (nature de la maladie, motifs de la décision, déroulement du geste) transmis par le médecin.

En aucun cas, l’administration par un tiers d’une substance létale à une personne ne peut être considérée comme une assistance au suicide, quelles que soient les directives anticipées et même si une personne de confiance a été désignée. Elle serait alors une euthanasie active.

Et lorsque la demande émane d’une personne consciente mais incapable d’accomplir elle-même de quelque manière qu’il soit le geste de suicide assisté, la loi ne pourrait pas, par définition, être mise en œuvre. Mais la médecine ne peut se considérer comme quitte et doit envisager à la demande de la personne un arrêt des soins de supports vitaux accompagné d’une sédation.

2. Décision d’un geste létal dans les phases ultimes de l’accompagnement en fin de vie

Lorsque la personne en situation de fin de vie, ou en fonction de ses directives anticipées figurant dans le dossier médical, demande expressément à interrompre tout traitement susceptible de prolonger sa vie, voire toute alimentation et hydratation, il serait cruel de la « laisser mourir » ou de la « laisser vivre », sans lui apporter la possibilité d’un geste accompli par un médecin, accélérant la survenue de la mort.

Il en va de même :

  • Lorsqu’une telle demande est exprimée par les proches alors que la personne est inconsciente, et en l’absence de directives anticipées figurant dans le dossier médical, dont la commission continue de souligner l’importance. Cette demande doit nécessairement être soumise à une discussion collégiale afin de s’assurer qu’elle est en accord avec les souhaits réels de la personne.
  • Lorsque le traitement en lui-même est jugé, après discussion collégiale avec le malade ou ses proches, comme une obstination déraisonnable, et que des soins de support n’auraient désormais pour objet qu’une survie artificielle.

Cette grave décision prise par un médecin engagé en conscience, toujours éclairée par une discussion collégiale, et présente dans le dossier médical, peut correspondre, aux yeux de la commission, aux circonstances réelles d’une sédation profonde telle qu’elle est inscrite dans la loi Leonetti.

Pour la commission, les critères qu’une loi voudrait imposer dans ce type de décision, ne pourront jamais contenir toute la complexité et la diversité du réel. Mais il paraît évident à la commission que dans l’esprit de la loi Leonetti, ce serait une sorte d’acharnement de « laisser mourir » ou de « laisser vivre » une personne, après arrêt de tout traitement et des soins de support.

Aux yeux de la commission, cette grave décision relève d’édictions de recommandations de bonnes pratiques d’une médecine responsable, plutôt que d’une nouvelle disposition législative.

3. Euthanasie

Le geste euthanasique à la demande des personnes malades, tel qu’il est à ce jour autorisé dans le seul Benelux, est un acte médical qui, par sa radicalité dans son accomplissement, et par sa programmation précise dans le temps, interrompt soudainement et prématurément la vie.

Il diffère totalement de la décision évoquée au point précédent.

Il diffère également totalement d’une assistance au suicide où l’acte létal est accompli par la personne malade elle-même.

L’euthanasie engage profondément l’idée qu’une société se fait des missions de la médecine, faisant basculer celle-ci du devoir universel d’humanité de soins et d’accompagnement à une action si contestée d’un point de vue universel. La commission ne voit pas comment une disposition législative claire en faveur de l’euthanasie, au nom de l’individualisme, pourrait éviter ce basculement.

Elle rappelle au demeurant que tout déplacement d’un interdit crée d’autres situations limites, toujours imprévues initialement et susceptibles de demandes réitérées de nouvelles lois. A titre d’exemple, en Belgique, 25 projets d’extension des cas de figure prévus par la loi ont été proposés depuis 2002…

 ******

Conclusion

Tous les échanges avec les personnes rencontrées, les nombreux témoignages, les déplacements dans la France entière et à l’étranger, les rencontres, les auditions, mettent au jour une réelle inquiétude sur les conditions  préoccupantes, trop  souvent occultées, de la fin de vie en France  et l’impasse des réponses posturales.

La commission rappelle deux observations centrales :

  • l’application insuffisante depuis 13 ans de la loi visant à garantir l’accès aux soins palliatifs, depuis 10 ans de la loi relative aux droits des malades (loi Kouchner), et l’enfin depuis 7 ans de la loi Leonetti.
  • le caractère particulièrement dramatique des inégalités au moment de la fin de vie.

Après ses recommandations largement développées, la commission souligne avec force :

  • avant tout, l’impératif du respect de la parole du malade et de son autonomie.
  • le développement absolument nécessaire d’une culture palliative et l’abolition de la frontière entre soin curatif et soin palliatif.
  • l’impératif de décisions collégiales.
  • l’exigence d’appliquer résolument les lois actuelles plutôt que d’en imaginer sans cesse de nouvelles.
  • l’utopie de résoudre par une loi la grande complexité des situations de fin de vie[3].
  • le danger de franchir la barrière d’un interdit.

Si le législateur prenait la responsabilité d’une dépénalisation d’une assistance au suicide, deux points majeurs doivent être ici affirmés avec netteté :

  • la garantie stricte de la liberté de choix en témoignant de l’autonomie de la personne.
  • l’impératif d’impliquer au premier chef la responsabilité de l’Etat et la responsabilité de la médecine.

De même, si le législateur prenait la responsabilité d’une dépénalisation de l’euthanasie, la commission entend mettre en garde sur l’importance symbolique du changement de cet interdit car :

  • l’euthanasie engage profondément l’idée qu’une société se fait du rôle et des valeurs de la médecine.
  • tout déplacement d’un interdit crée nécessairement de nouvelles situations limites, suscitant une demande indéfinie de nouvelles lois.
  • toute médecine comporte sa part d’action aux confins de la vie sans qu’il soit nécessaire de légiférer à tout coup.

La commission souhaite remercier le Président de la République d’avoir ouvert un tel espace de réflexion, dont on pressent l’importance pour l’avenir.

La commission entend à l’issue de son travail souligner qu’il serait illusoire de penser que l’avenir de l’humanité se résume à l’affirmation sans limite d’une liberté individuelle, en oubliant que la personne humaine ne vit et ne s’invente que reliée à autrui et dépendante d’autrui.  Un véritable accompagnement de fin de vie ne prend son sens que dans le cadre d’une société solidaire qui ne se substitue pas à la personne mais lui témoigne écoute et respect au terme de son existence.


[1] Par exemple  les directives suisses (Académie médicale suisse), allemandes, américaines (par exemple Oregon Health Decisions)

[2] Prenant en compte par exemple le programme suivis par un nombre croissant d’Etats aux Etats-Unis (Physician orders for life-sustaining treatment)

[3] « Ne légiférez qu’en tremblant, ou bien, Entre deux solutions, préférez toujours celle qui exige le moins de droit et laisse le plus aux mœurs ou à la morale » CARBONNIER, Jean. Flexible droit, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, EJA, Paris, 1998

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